•  

     

    5%20lyceeeeeeeeeens

    Cinq élèves du Lycée Buffon, qui participèrent à la manifestation du 11 Novembre 1940, multiplient les actes de rébellion contre l'occupant. Arrêtés tour à tour, ils sont fusillés par les Allemands le 8 février 1943.

    Le plus jeune, 15 ans à peine, en octobre 1940, s'appelle Pierre Benoit. Le plus âgé, Jacques Baudry, qui prépare Polytechnique, a 18 ans. Enfin, il y a Pierre Grelot, 17 ans, élève de première, Lucien Legros, 16 ans, qui se passionne pour la peinture et la poésie, Jean-Marie Arthus, 15 ans lui aussi. Ces jeunes lycéens vont faire preuve d'une conscience politique hors du commun pour leur âge et s'engager dans un combat qui va les mener au sacrifice ultime.

    Leur engagement est favorisé par un certain nombre de professeurs du lycée Buffon, qui, en cette rentrée du 1er octobre 1940, refusent la mainmise de l'idéologie du gouvernement du maréchal Pétain sur l'institution scolaire. Parmi eux, Raymond Burgard édite un journal clandestin intitulé "Valmy", en référence à la célèbre bataille. Il fustige les "Boches" et proclame: << Nous avons un seul ennemi: l'envahisseur >>. Dans un des numéros, il appelle à << secouer les chaînes, à ne pas être un peuple de chiens couchants, léchant les bottes prussiennes >>.

    Son influence est certaine sur les jeunes du lycée Buffon, qui sont nombreux à rejoindre la manifestation ce 11 Novembre à l'Arc de Triomphe, laquelle rassemble des lycéens et des étudiants de toutes origines politiques, des nationalistes aux communistes. Une action saluée par le général de Gaulle et à laquelle participent Pierre Benoit, Jacques Baudry, Pierre Grelot, Lucien Legros et Jean-Marie Arthus. Ensemble, ils bravent la police française et les soldats allemands qui arrêtent plus de 100 manifestants, dont une dizaine en provenance du lycée Buffon.

    Le groupe des cinq récidive le 11 mai 1941 en se rassemblant, avec d'autres dont Raymond Burgard, devant la statue de Jeanne d'Arc dont le symbole transcende les clivages politiques et religieux. Tout au long de cette période, Benoit, Baudry, Grelot, Legros et Arthus, se rencontrent, impriment et distribuent des tracts qui appellent à l'action violente contre les Allemands.

    83604332 o

     

     

    Adhérant aux Francs-tireurs et partisans (FTP) durant l'hiver 1941, ils rassemblent des armes. Quand leur professeur est arrêté, ils organisent une manifestation de protestation le 16 avril 1942 à l'intérieur du lycée Buffon.

     

    Ils chantent La Marseillaise et appellent à << libérer Burgard >> (1), provoquant l'intervention de la police.

     

    Les cinq lycéens, s'étant enfui à temps, échappent à l'arrestation. Recherchés, Benoit et Legros sont fichés; ils entrent dans la clandestinité. Ils radicalisent leur action et commettent un attentat sur le quai Malaquais contre un officier de la Luftwaffe qu'ils abattent en plein jour.

    Ils lancent aussi des grenades contre une péniche où est organisée une réception à laquelle participent des soldats de la Wehrmacht. Les 3 et 4 juin, Legros, Arthus, Baudry et Grelot sont arrêtés par la police française. Le 17, ils sont condamnés aux travaux forcés à perpétuité. Pierre Benoit, qui échappe à l'arrestation, est condamné à mort par contumace. Depuis Fontainebleau, il organise des sabotages de voies ferrées et d'aérodromes. Blessé au genou au cours d'une opération, recherché dans toute la région parisienne, il se cache dans les égouts et parvient à rentrer à pied vers Paris.

    Mais le 22 août, arrêté par la police, Benoit est ensuite livré à la Gestapo.

     

    Après un nouveau procès en octobre, ils sont tous condamnés à mort par un tribunal de laLuftwaffe.

     

    Au président qui les interroge, ils répliquent qu'ils sont fiers de mourir pour leur pays.

     

    Ils passent les quatre derniers mois de leur vie à la prison de Fresnes. Baudry et Legros font deux tentatives d'évasion et sont mis à l'isolement.

    Le 8 février 1943, ils sont réveillés à l'aube et emmenés au champ de tir d'Issy-les-Moulineaux où ils sont susillés, puis inhumés anonymement au cimetière d'Ivry. Le matin même, Pierre Grelot avait écrit à ses parents: << Tout est fini maintenant. Je vais être fusillé à 11 heures. Pauvres parents chéris, sachez que ma dernière pensée sera pour vous. Je saurai mourir en Français >>.

    A la Libération, les "Cinq" seront cités à l'ordre de la nation et décorés à titre posthume de la Légion d'Honneur, de la Croix de guerre avec palmes et de la médaille de la Résistance. En 1952, leurs corps sont incinérés et l'urne contenant leurs cendres est déposée dans la crypte de la chapelle de la Sorbonne. Chaque année, devant la statue du jardin du Luxembourg, une cérémonie est organisée à la mémoire des étudiants et lycéens résistants morts pour la France.

     

    Anonyme

    Les Chemins de la Mémoire / n° 230 / 10-2012

     

    (1) Condamné à mort, il est guillotiné en Allemagne dans l'enceinte de la prison de Cologne le 15 juin 1944.

     

     

     http://ufacbagnolet.over-blog.com/article-lycee-buffon-des-lyceens-en-resistance-116324256.html

     


    votre commentaire
  •  

    B- Une Perception négative de la maigreur liée aux guerres (Première et Seconde Guerres Mondiales)

    Les tickets de rationnement

    DOSSIER LES CIVILS DANS LA GUERRE 

     

    Créé en 1939, le ministère du Ravitaillement est chargé de l'orientation de la production agricole, de la centralisation et de la distribution des produits avec, pour finalité, l'assurance pour chaque Français de recevoir un minimum vital de denrées et de produits, à un prix abordable.

     

    À partir de septembre 1940, chaque Français reçoit une carte nominative de ravitaillement. Il en existe pour le pain, la viande, les matières grasses ; d'autres pour les textiles ou le charbon.

     B- Une Perception négative de la maigreur liée aux guerres (Première et Seconde Guerres Mondiales)

    Chaque mois, les familles retirent à la mairie, pour les consommations journalières, des coupons composés de tickets ornés de chiffres et de lettres qui sont remis aux commerçants pour acheter de la marchandise.

     

    Les consommateurs ont droit à une quantité de denrées fixées par le gouvernement en fonction des stocks disponibles, et correspondant à leurs besoins estimés.

     

     

     

    Il existe huit catégories :

    E : moins de 3 ans.

    J1 : 3-6 ans.

    J2 : 6-12 ans.

    J3 : 12-21 ans et

    femmes enceintes 1 630 calories.

    A : 21-70 ans non travailleurs de force.

    T : 14-70 ans, travailleurs de force.

    C : plus de 12 ans effectuant des travaux agricoles.

    V : plus de 70 ans.

     

    Certaines denrées ne sont fournies qu'aux travailleurs de force, d'autres qu'aux enfants.

    La consommation de pain varie entre 100 et 350 grammes par jour.

    Les tickets de pain sont donc modulables.

    Ils sont fournis par le client au restaurant ou apportés par les invités à la maîtresse de maison qui les reçoit.

     

    Les marchandises textiles ne sont pas disponibles en permanence mais en fonction de déblocages que le public apprend par la presse.

    Pour certains produits - les chaussures, par exemple -,

    il faut demander un bon d'achat à la mairie qui apprécie arbitrairement les raisons fournies.

     

     

    Le système ne va pas sans fraude puisque circulent deux millions de cartes de plus que le nombre de consommateurs.

    Le moyen le plus simple est de déclarer une perte des coupons.

    On peut aussi acheter dans les couloirs du métro de fausses cartes de pain. M.C.

     

     

    B- Une Perception négative de la maigreur liée aux guerres (Première et Seconde Guerres Mondiales)

     

     

     

     

     

     


    1 commentaire
  • LA QUEUE DU DIABLE
    Conte du Bocage Normand
    par
    A. Almagro
    _____

    Lecteur bénévole et charmante lectrice, je viens vous raconter une histoire qui vous semblera peut-être un conte, tant elle est invraisemblable, mais qui doit être vraie de tout point, car je l’ai tirée d’un recueil d’anciennes légendes, et je suis persuadé que le pieux anonyme qui nous les a transmises pour notre instruction et notre édification était un homme véridique, qui n’aurait jamais voulu compromettre le salut de son âme en cherchant à nous faire prendre les vessies pour des lanternes.

    La légende étant écrite dans un style vieillot et peu intelligible, je me suis dit qu’il serait utile de lui donner une forme plus jeune et de la traduire dans le style du jour ; et c’est ici qu’a commencé mon embarras. Quel genre de style devais-je adopter ? Le genre sentimental, vaporeux et nuageux ? Il est quelque peu démodé et j’aurais ennuyé mes lecteurs qui ont bien assez de sujets d’ennui. Le genre réaliste ? J’aurais fait rougir les dames. Un instant je me suis arrêté à l’idée de recourir au genre décadent, aujourd’hui fort en vogue et qui se glisse comme un serpent sous la prose fleurie de maint auteur de talent. En mettant mon esprit à la gêne, je serais parvenu, moi aussi, à trouver de ces phrases péniblement niaises, de ces tours inattendus et de ces locutions extravagantes, qui font les délices du décadent qui les écrit et causent au profane qui ose les lire un étonnement voisin de la stupéfaction. Toutefois, si séduisant que fût ce projet, j’ai dû y renoncer par crainte qu’on ne crût que je parlais charabia, ce qui m’eût profondément humilié.

    Tout bien pesé, j’ai pris le parti de revenir au chemin battu, qui est le bon, et de me servir du style pédestre, simple et uni, parlant comme tout le monde pour que tout le monde me comprenne.

    Ceci dit en guise de préface, j’entre en matière.


    I

    Il y avait une fois, au pays bas-normand, une veuve et sa fille qui vivaient pauvrement dans une pauvre maisonnette, aux murs de torchis et au toit de chaume, comme toutes celles de la campagne d’alentour. Une petite vache, des poules, un cochon, sauf votre respect, un courtil peu étendu, un jardinet et quelques pommiers formaient tout leur avoir, auquel s’ajoutait le mince produit de leurs fuseaux qui tournaient, tournaient sans cesse.

    Grâce aux indications de l’anonyme, je puis préciser l’endroit où s’élevait la maisonnette de la veuve ; c’était dans l’un des hameaux qu’on voit éparpillés à travers la verdure sur les pentes méridionales du mont de Cérisy, à une faible distance de la célèbre abbaye de Belle-Etoile et à quelques milles des murs de Tinchebray, qui, soit dit en passant, était alors une petite ville assez malpropre, mais ne fut à aucune époque une caverne de voleurs, ainsi qu’on l’a faussement prétendu.

    Notre veuve portait gaillardement ses cinquante-cinq hivers. Elle n’avait rien d’attrayant, je dois le confesser ; elle était longue et maigre comme le carême, laide comme le péché et mauvaise comme la lèpre ; quant à son caractère, c’était le plus maussade, hargneux et acariâtre que le ciel eût jamais créé dans son juste courroux. On l’avait surnommée la mère Rabat-Joie, parce que sa seule présence suffisait pour rabattre et éteindre toute joie et tout contentement.

    Son mari, qu’on appelait le père Mathieu, succomba à dix de mariage qui furent dix ans de lente torture ; il expira en bénissant la mort qui le délivrait de sa femme. Le curé de la paroisse était très attaché au père Mathieu qui avait été son chantre et son sacriste ; il annonça en chaire qu’il dirait un certain nombre de messes pour le repos de cette âme en peine ; mais le père Mathieu revint tout exprès de l’autre monde pour le prier de n’en rien faire, assurant qu’il n’avait besoin de rien, que son âme était en repos et qu’il était allé tout droit en paradis, ayant fait son purgatoire ici-bas.

    Si la mère Rabat-Joie fut méchante et dure envers son mari, on s’imagine aisément qu’elle ne le fut pas moins envers sa fille, laquelle avait nom Mariette et semblait  prédestinée au même sort que son père.

    Mariette était alors dans tout l’éclat et toute la fraîcheur de la jeunesse. Elle était bonne comme la manne du ciel, belle et radieuse  comme une aube de mai, chaste et pure comme le lis du vallon, modeste, recueillie et obéissante comme une nonne ; avec cela très dévote à la bienheureuse Vierge Marie, à l’archange saint Michel, vainqueur du démon, et aux saints Anges, gardiens et protecteurs de sa vertu. Sa bonne grâce, son air candide et son angélique patience lui avaient gagné tous les cœurs ; chose à peine croyable : elle n’avait jamais donné le moindre signe de coquetterie. Bref, elle était, au physique et au moral, tout l’opposé de sa mère, et l’on se demandait par quel caprice ou quel prodige de la nature une si vilaine chouette avait pu mettre au monde une si douce, tendre et innocente colombe.

    Dans l’opinion du peuple Mariette passait pour une sainte, une vraie sainte du paradis, ce qui alors n’était point rare, mais ne se voit plus depuis longtemps. Cette auréole de sainteté, loin de toucher l’âme de son odieuse mère, ne fit que l’exciter à redoubler de mauvais traitements. Grondée, accablée d’injures, souvent battue, la pauvrette souffrait en silence, offrant ses peines au Seigneur en expiation de fautes qui n’étaient pas les siennes. Tandis que d’autres jeunes filles, fières de leur bonheur, traversaient joyeusement la vie, la chanson aux lèvres et le front couronné de roses et de myrte, elle s’y traînait douloureusement, courbée sous sa lourde croix et le front couronné d’épines.

    Parmi les jeunes gens les plus huppés et les plus riches de la contrée, plus d’un, ému de son malheur et séduit par ses charmes, eût volontiers tenté de l’arracher à son dur esclavage en se l’attachant par les liens de l’hyménée ; plus d’un même fut assez téméraire pour aller demander sa main. Mais la mère Rabat-Joie rabattit leur ardeur amoureuse ; l’accueil fut si brutal qu’ils durent fuir à toutes jambes et s’estimèrent heureux d’avoir sauvé leurs yeux des griffes du monstre.

    Cet exemple refroidit le zèle des autres prétendants qui, de guerre lasse, renoncèrent à une poursuite par trop dangereuse. Evidemment, pour dompter ou endormir le dragon redoutable qui veillait à la garde d’un si précieux trésor, il n’eût fallu rien moins que le diable, le diable lui-même. La jeune victime fut donc abandonnée à son triste sort et se vit irrévocablement condamnée à mourir vierge et martyre.

    Mariette était aussi laborieuse que bonne ; c’était une excellente ménagère et une fileuse incomparable. Entre ses doigts de fée le chanvre disparaissait si vite que les gens du pays croyaient que les anges descendaient du Ciel pour l’aider à filer sa quenouillée. Elle était propre, soigneuse, et lorsqu’elle ne filait pas, on la voyait vaquer avec ardeur aux soins multiples du ménage : elle cousait, lavait, repassait, nettoyait la maison, apprêtait les repas, trayait la petite vache, sa seule amie dans cette solitude, battait le beurre et en faisant de si exquis qu’il eût pu figurer sur la table du pape.

    Sa mise était toujours d’une extrême simplicité ; pas de colifichets, ni de parures, ni aucun de ces riens coûteux, inventés pour la perdition des femmes. Elle ne paraissait jamais aux assemblées ; elle n’allait à aucune noce, quoiqu’elle en fût souvent priée. Sa seule sortie était pour se rendre à l’église, où elle priait avec une ferveur exemplaire. Notre siècle corrompu ignore, hélas ! ces vertus simples et rustiques. La perversité des villes a envahi les campagnes et en a altéré les traditions et les mœurs. L’innocence primitive s’est enfuie, la face voilée, vers d’autres sphères, et le mal, qui jadis était partiel et passager, est devenu général et durable. Il est aisé de voir que nous approchons de la fin du monde.

    Un soir, à la veillée, Mariette préparait le souper et étendait la pâte grise de sarrasin sur la galettoire de terre cuite que chauffait un feu clair. Ce n’était pas la galette du riche, mince, légère, où abondaient le beurre et les œufs frais, mais la galette du pauvre, lourde, massive, sans œufs,  et presque sans beurre. Le matin, un amoureux s’était présenté ; il fut reçu, cela va sans dire, en ennemi, et ce fut un miracle s’il ne laissa pas sa peau sur le champ de bataille. L’humeur de la mère Rabat-Joie s’en était ressentie ; ce n’était plus du vinaigre, c’était du vitriol. Mariette fut injuriée tout le jour et souffletée à plusieurs reprises ; comme si c’était un crime pour une jeune fille charmante et malheureuse d’inspirer la pitié et l’amour !

    Le soir, l’orage grondait encore et la grêle menaçait toujours. Mariette tremblait comme la feuille ; sa main était mal assurée et, en voulant retourner la galette, elle la laissa maladroitement tomber dans les cendres. A la vue de cette catastrophe, la mégère pousse un cri de rage. « Coquine, hurle-t-elle, ribaude, dévergondée, tu n’en fais jamais d’autres ; je voudrais que le diable t’emporte ! » Et elle répète par trois fois d’une voix stridente : « Oui, je voudrais que le diable t’emporte ! »

    Fatale imprudence ! Par le plus grand des hasards, à cet instant même, le diable rôdait aux alentours, étant venu dans le pays pour aider un baron de ses amis à délivrer une jolie nonnain enfermée contre son gré dans un moutier du voisinage. Le cri de la mère Rabat-Joie, retentissant dans les ténèbres, parvient à son oreille ; il reconnait sa voix, entend son vœu impie et fait un bond de joie si violent qu’il casse comme un fêtu, avec son crâne, une grosse branche de pommier sous laquelle il passait à ce moment.

    D’ordinaire il ne prêtait aucune attention aux souhaits de cette sorte ; s’il lui fallait emporter tous ceux dont on lui fait don ou qui se donnent à lui, son temps si précieux n’y suffirait point. Mais cette fois le cas est bien différent ; il ne s’agit pas d’une proie vulgaire ; il s’agit bel et bien d’une sainte, d’une véritable sainte. Quel triomphe pour ce maudit si, à la barbe du Tout-Puissant, il emportait une sainte au séjour des damnés ! Tout l’enfer serait dans l’allégresse et l’on devine sans peine ce que peut être l’allégresse de l’enfer. Les gazetiers de là-bas lui consacreraient des articles élogieux et menteurs où l’enthousiasme déborderait à tant la ligne ; les poètes lui dédieraient des strophes enflammées ; les hauts dignitaires lui liraient des adresses et baiseraient avec respect ses pieds de bouc ; les garde-chiourmes l’acclameraient à grand bruit de chaînes ; on lui élèverait des arcs-de-triomphe faits d’ossements humains, et sa gloire éclipserait celle des plus fameux conquérants, qu’il connaissait tous intimement, puisqu’ils logeaient chez lui.

    Pour dire le vrai, il se méfiait de la mère Rabat-Joie. Elle ne lui était pas inconnue et il ressentait même pour elle de l’estime et de l’amitié, à preuve qu’il lui réservait une chaudière d’honneur ; mais enfin il s’en méfiait et ne comptait guère qu’elle accomplit religieusement sa promesse. Il comptait plutôt sur lui-même et sur l’abondante provision de ruses, de pièges et de stratagèmes qu’il portait toujours dans son bissac. Aussi, sans s’amuser aux bagatelles, conçut-il sur-le-champ un projet machiavélique et diabolique qu’il n’allait pas tarder à mettre à exécution et dont nous verrons plus loin les fâcheuses suites.

    Le roi des damnés avait raison de se méfier de la mère Rabat-Joie, car elle ne songeait nullement à lui livrer sa fille, laquelle, après tout, était le sang de son sang et la chair de sa chair. Elle avait été trop vive, c’est évident, elle avait parlé sans réfléchir, dans un accès de colère. La visite intempestive de l’amoureux, puis la vue de la galette renversée dans les cendres l’avaient mise hors des gonds et lui avaient fait oublier les règles de la civilité ; mais un chrétien n’est pas tenu d’accomplir une promesse imprudente. Jarnicoton ! donner sa fille à Satan ! Jamais de la vie. Et qu’il ne s’avisât pas de venir la réclamer, car, foi de normande, elle lui casserait les cornes.

    A cet endroit du récit, l’auteur anonyme de la légende, qui était très probablement un moine de l’abbaye  de Belle-Etoile et paraît avoir beaucoup connu la mère Rabat-Joie, entre à son sujet dans des détails curieux et instructifs dont je me ferais un scrupule de priver mes lecteurs. A l’en croire, la veuve du père Mathieu était une femme de principes austères auxquels elle conformait tous ses actes, et elle avait des idées très personnelles sur une foule de questions. Elle en avait, par exemple, sur l’éducation des filles et avait imaginé un système éducatif qui reposait tout entier sur l’antique maxime : Qui aime bien, châtie bien. Elle prenait la maxime à la lettre et appliquait son système dans toute sa rigueur. C’est parce qu’elle aimait sa fille qu’elle la châtiait sans l’ombre d’une raison, et c’est parce qu’elle l’aimait beaucoup qu’elle la châtiait sans miséricorde. Qui aime bien, châtie bien. C’était logique, mais très désagréable pour la pauvre Mariette.

    Ses idées sur la propriété n’étaient pas moins dignes de remarque. « Ma fille, disait-elle, est ma propriété, mon bien, ma chose, puisque c’est moi qui l’ai faite (elle oubliait le père Mathieu, mais passons). Quiconque, sous prétexte de mariage, s’introduit chez moi et cherche à me la ravir, attente à ma propriété ; c’est un voleur, un pirate, un scélérat, et je lui briserai les reins, jour de Dieu ! Au surplus, ajoutait-elle, je ne veux pas qu’elle se marie, et elle ne se mariera pas, car tel est mon bon plaisir. On est mère ou on ne l’est pas. » C’est ainsi que la mère Rabat-Joie comprenait la propriété ; il est douteux que les prétendants à la main de Mariette la comprissent de la même façon.

    L’opinion qu’elle professait sur les hommes en général était tout à fait singulière. Pour elle l’humanité n’était qu’une immense fourmilière de petits êtres vicieux, difformes et ridicules qui passaient tout leur temps à se contredire et à s’entre-dévorer. C’était une espèce plus nuisible qu’utile et dont la perte affligerait plutôt le diable que le bon Dieu. Conclusion : l’humanité est haïssable, il faut la haïr ; et toujours conséquente, elle détestait cordialement l’humanité qui le lui rendait avec usure.

    Mais ce qu’elle détestait par-dessus tout, c’était le diable ; elle lui avait juré une haine farouche, implacable ; il était sa bête noire et son cauchemar. Dans ce sentiment il entrait de la jalousie de métier et une peur atroce d’aller bouillir dans la grande chaudière. Autant elle exécrait le diable, autant, par une conséquence naturelle, elle admirait et révérait l’archange saint Michel qui l’avait combattu et vaincu. Il existait dans sa paroisse une confrérie d’hommes qui avait saint Michel pour patron et qui chaque année accomplissait un pèlerinage au mont béni où trône le glorieux archange. La mère Rabat-Joie ne manquait jamais d’en faire rapporter par quelque pèlerin des médailles de plomb à l’effigie du saint et de menus objets de piété qu’elle conservait comme un talisman.

    Cette confrérie possédait sa chapelle dans l’église paroissiale, avec un autel spécial surmonté d’un groupe, œuvre d’un moine sculpteur de l’abbaye de Belle-Etoile et qui représentait saint Michel terrassant le démon. Rien de si noble, de si animé et de si harmonieux que ce groupe où le génie de l’humble religieux avait mis comme un souffle de vie. Le guerrier céleste se dressait superbe, faisant flamboyer dans sa main l’épée vengeresse, tandis que l’éternel révolté se tordait en rugissant sous son pied vainqueur. Des cierges brûlaient devant la sainte image, et la mère Rabat-Joie y avait toujours le sien.

    C’est là qu’elle venait faire ses dévotions accoutumées, profitant du moment où l’église était déserte, afin, disait-elle, d’avoir moins de distractions. Agenouillée devant l’autel, elle priait d’abord le saint longuement et avec humilité ; puis, sa prière faite, elle sautait sur ses pieds et, menaçant du poing le démon, elle l’apostrophait ainsi :

    « Vilain sire, tu es laid comme Judas Iscariote, noir comme la conscience d’un procureur, barbu comme un bouc, cornu comme un mari trompé, et tu portes des griffes sales et crochues que t’envierait un usurier juif. Tu fais une grimace aussi drôle que celle du braconnier Jean Le Borgne, que les archers emmenèrent et que je vis pendre à Domfront. Tu es plus méchant que moi, vieux loup-garou. Je voudrais te voir rôtir à la broche dans ta cuisine d’enfer et je t’arroserais de grand cœur avec du plomb fondu. Si je te tenais, bandit, canaille, hérétique, je t’arracherais la queue, je t’arracherais les griffes et les cornes, puis je te tordrais le cou comme à un poulet. Ainsi soit-il. »

    Le démon ne répondait pas, et la mère Rabat-Joie, ayant débité son chapelet d’injures qu’elle appelait l’oraison au diable, s’en retournait triomphante et satisfaite.


    II

    Peu de temps après la soirée orageuse où la mère Rabat-Joie entra en si belle fureur et fit si beau tapage pour une galette mal retournée, il vint au pays un étranger qui excita partout sur ses pas la plus vive curiosité. C’était un de ces chanteurs nomades, connus sous le nom de trouvères ou troubadours et qui s’en allaient de ville en ville et de château en château, déclamant ou chantant leurs vers où ils célébraient les exploits des preux et la beauté des dames.

    Celui-ci n’avait pas la mine famélique ni le costume râpé de ses confrères ; on l’eût pris plutôt pour un gentilhomme. Il était grand, élancé, d’élégante tournure, avec des traits expressifs, un teint bistré et comme brûlé, une barbe rousse en pointe et des yeux dont on avait peine à soutenir l’éclat. Son accoutrement était aussi riche que fantastique ; tout y était rouge, depuis la fine chaussure de cuir de Cordoue jusqu’à la toque de velours que surmontait une plume écarlate. Par un singulier caprice, cette toque était comme soudée à son front ; jamais on ne le vit tête nue. Il fut surnommé l’Homme-Rouge, et lorsqu’il s’avançait d’un pas rapide et que le vent secouait les rouges plis de son manteau, on l’eût cru enveloppé de flammes.

    Il jouait de tous les instruments et chantait agréablement d’une voix vibrante qui avait quelque chose de métallique. On avait remarqué que jamais il ne franchissait le seuil d’une église ni d’un lieu consacré, et l’on en conclut qu’il devait être maure ou païen ; bien certainement il n’était pas juif, car il se montrait large jusqu’à la profusion et généreux jusqu’à la prodigalité. On en fut quelque peu surpris, les disciples de la gaie science n’ayant pas l’habitude de rouler sur l’or : art et pauvreté sont frère et sœur. Du reste, quelle que fût la source de ses richesses, qu’elles vinssent du ciel ou de l’enfer, le fait est qu’elles lui attirèrent une grande considération et lui firent de nombreux amis.

    On ignorait son nom et sa patrie. Aux curieux qui l’interrogeaient sur ce dernier point, il se contentait de dire que son pays était très loin, très loin, qu’il y faisait très chaud, très chaud, qu’on y arrivait par des routes fleuries, que les gens de toute condition s’y précipitaient par milliers et qu’aucun n’en sortait, tant ils s’y trouvaient bien. Ceux qui l’écoutaient auraient voulu vivre dans ce pays-là.

    Quoiqu’il fût, à n’en pas douter, de haute origine, il n’avait pas de morgue et frayait familièrement avec tout le monde. Il avait un entrain endiablé et de l’esprit comme un démon. Il buvait aux assemblées autant que quatre normands et n’en était pas plus gris ; il dansait ou faisait danser des journées et des nuits entières et n’en était pas plus las ; il restait à table, selon l’us et coutume de Basse-Normandie, huit heures consécutives et n’en était pas plus repu. C’était le boute-en-train de toutes les fêtes, de toutes les noces, et il n’y avait pas de bonne partie sans le gai et amusant compagnon qui s’appelait l’Homme-Rouge.

    Il advint sur ces entrefaites que le seigneur de Briouze songea à marier sa fille, jolie personne, quoique boulotte et marquée de taches de rousseur ; le prétendu était un grand benêt dont le père, autre seigneur du voisinage, n’en ayant pu rien faire, avait pris le parti extrême de le marier dans l’espoir que sa femme en ferait quelque chose. Le seigneur de Briouze était de la première noblesse, car il se vantait de descendre du bâtard d’un bâtard de je ne sais quel duc de Normandie ; il était très instruit, à preuve qu’il savait lire et signer son nom. Il avait un beau château, une belle meute, de beaux étangs et de beaux domaines tellement vastes, qu’il s’y perdait chaque fois qu’il allait les visiter. Mais ce qu’il avait de plus beau, c’était son bourg de Briouze.

    Ce n’est pas que les chemins qui y menaient fussent moins effondrés que partout ailleurs, ni les masures moins sordides, ni les échoppes moins puantes. Sa beauté consistait dans la façon originale et neuve dont les habitations étaient groupées. D’ordinaire, lorsqu’un bourg se bâtit, les maisons se rangent tant bien que mal le long des chemins et finissent par former des rues et des places. A Briouze rien de pareil : ni places, ni rues ; les maisons étaient jetées çà et là à travers le terrain, se présentant sous toutes les faces, les unes par devant, d’autres par derrière, d’autres de côté, dans la plus complète indépendance et sans le moindre souci de la géométrie. On eût dit qu’elles étaient tombées du ciel et qu’elles s’étaient fichées dans le sol au hasard de la chute. Depuis lors la civilisation a passé par là, escortée d’ingénieurs des Ponts et Chaussées et d’agents voyers, et elle a mis de l’ordre dans ce beau désordre ; mais si Briouze y a gagné, le pittoresque y a beaucoup perdu.

    Les gars de Briouze étaient de fort braves gens, élevés dans la crainte de Dieu et de leur seigneur, qui était un maître débonnaire et doux, et dont ils conservèrent la mémoire en mettant sa figure moustachue, sculptée sur pierre, au-dessus du portail de leur église, où on la voit encore. Ils n’avaient qu’un défaut ou plutôt qu’une passion : ils aimaient à boire. Dans ce bienheureux pays il régnait une soif inextinguible ; les femmes y buvaient comme des hommes, et les hommes comme des trous. Le café était alors inconnu ; l’eau-de-vie était un remède d’apothicaire et le vin réservé à la table des riches ; mais il restait le gros cidre et le poiré, et le diable n’y perdait rien. Chaque maison était un cabaret ; au-dessus de chaque porte verdissait la branche de houx qui chuchotait à l’oreille du passant : Ici l’on boit. Et le passant entrait, s’attablait et buvait ; et tous les assoiffés de la campagne environnante accouraient là par bandes pour se désaltérer.

    On conçoit, d’après ces goûts bachiques, avec quels transports fut reçue la nouvelle du mariage seigneurial, qui promettait des noces splendides et de franches lippées. Le seigneur était puissamment riche et aussi libéral que riche ; il invita, outre les parents et les amis, ses vassaux, ses tenanciers, tous ceux qui dépendaient de lui, c’est-à-dire le pays tout entier. D’immenses tentes avaient été dressées pour abriter le populaire, pendant que la gent blasonnée s’ébaudirait dans la grande salle du château.

    Ainsi qu’il fallait s’y attendre, on fit venir l’Homme-Rouge pour entretenir la gaîté et dégourdir les jambes de la jeunesse. Il fut jovial, infatigable, pétillant de verve, étourdissant, cynique. Il chanta devant les nobles invités une sorte d’épithalame émaillé de termes équivoques et de facéties plus que libres, qui faisaient rougir la mariée et rire aux éclats son imbécile d’époux. Il poussait à boire, portait des défis aux plus intrépides buveurs et buvait lui-même comme s’il eût voulu éteindre un incendie intérieur. Onques on ne vit si monstrueuse ripaille ; elle dura sept jours et sept nuits, pendant lesquels on mangea des troupeaux et l’on but la récolte de cidre d’une année.

    A la fin, le diable s’en mêla. Le vin aux épices et les flots de cidre pur avaient à tel point échauffé les têtes, qu’une sorte de délire furieux s’empara de tous les convives, nobles et manants. L’époux gifle sans égard sa tendre moitié, qui tombe en pâmoison ; le beau-père saute à la gorge de son gendre ; les épées sortent du fourreau ; les rustres brandissent leurs gourdins ; la mêlée est épouvantable ; chacun frappe au hasard, pris d’une rage aveugle ; ce ne sont que cris de détresse, injures, imprécations et blasphèmes ; vaisselle, brocs,  gobelets, écuelles, débris de tables et de bancs volent de toutes parts. Dans cette effroyable bagarre, il y eut des membres brisés, des crânes fendus, des côtes enfoncées, des morts laissés sur le carreau parmi des flaques de sang et dans une inondation de cidre. Le banquet de noces, commencé dans la joie, se termina comme le festin des Lapithes, et l’Homme-Rouge s’en alla en pouffant de rire.

    Le lecteur aura deviné que l’Homme-Rouge n’était autre que l’esprit malin, lequel, venu sous un déguisement pour rendre visite à la mère Rabat-Joie, son ennemie intime, avait voulu tout d’abord s’amuser un brin, en jouant aux gars de Briouze, moins malins que lui, un tour de sa façon dont ils se souviendraient dans les siècles des siècles. Il se disposa, aussitôt ce bel exploit accompli, à exécuter le noir dessein qui lui avait fait entreprendre son voyage terrestre. Son but était de s’introduire chez la mère Rabat-Joie sous prétexte de lui demander la main de sa fille, de gagner ses bonnes grâces à force de bassesse ; puis, un beau jour, d’emporter l’infortunée Mariette en laissant là sa respectable mère à laquelle il ne tenait pas. Le plan, comme on voit, était aussi simple qu’infâme et n’eût pas été indigne d’un baron de grands chemins. Malheureusement pour l’auteur de cette trame infernale, la mère Rabat-Joie avait aussi son idée qu’elle mûrissait dans l’ombre et le mystère. C’était une rusée commère, dissimulée comme pas une, et qui, en fait de roueries, eût rendu des points à toute la robinaille de Domfront et au diable lui-même. Elle l’avait du premier coup dévisagé et reconnu, et se tenait sur le qui-vive, prête à lui rendre embûche pour embûche.

    Un matin, l’Homme-Rouge se présente chez elle, la bouche en cœur, sémillant, pomponné, mis à la dernière mode qu’il eût inventée, et inondé d’eaux de senteur pour masquer certaine odeur sulfureuse qui se dégageait de sa personne. Sa vue fait sur Mariette l’effet de celle du loup sur l’innocente brebis. Saisie d’une terreur subite, elle s’enfuit toute tremblante dans le coin le plus éloigné de la demeure et, tombant à genoux, prie avec larmes le saint archange Michel et les saints anges gardiens d’écarter d’elle le péril qu’instinctivement elle sent suspendue sur sa tête.

    La mère Rabat-Joie ne se déconcerte pas et reçoit le visiteur d’un air gracieux et affable. « Bonjour, cousine », lui dit-il à brûle-pourpoint. Elle fait un geste de surprise, mais l’Homme-Rouge lui déroule une interminable généalogie, où le diable seul comprendrait quelque chose, et qui prouve clair comme le jour qu’ils ont pour auteur commun un certain Caïn, mort depuis très longtemps et qui tua son frère par mégarde. La veuve semble flattée d’une si illustre origine et accepte d’autant plus volontiers le cousinage, que dans ce pays-là on cousine jusqu’au trentième degré de parenté. Il la complimente alors sur sa réputation de femme à principes, sur son système d’éducation et sur ses opinions philosophiques qui étaient aussi les siennes. Il se décide enfin à fondre la cloche et lui dépeint en termes éloquents la violence de l’amour que lui ont inspiré les charmes de Mariette. « J’ose espérer, ajoute-t-il, chère cousine, que vous voudrez bien donner votre consentement maternel à cette union qui comblera tous mes vœux. »

    La chère cousine d’abord ne répond ni oui ni non, selon l’usage de Normandie, et comme l’amoureux insiste de plus belle, elle finit par se rendre et dit franchement oui. « Mais Mariette, interroge-t-il avec anxiété, est-elle disposée à consentir » ? « Ma fille, répond gravement la mère Rabat-Joie, consentira du moment que je consens. Grâce à mon système d’éducation, et je vous le recommande, mon gendre, quand vous aurez des enfants, grâce à ce système je l’ai rendue souple comme un gant et docile comme un agneau. Ma volonté est la sienne, et elle acceptera de ma main un borgne, un bossu, un bancal, le diable même, à plus forte raison un gentil cavalier tel que vous. N’ayez souci, j’en fais mon affaire. Adieu, mon gendre ». « Adieu, belle-maman », répond l’Homme-Rouge, et il se retire joyeux et fier du rapide avancement qu’il avait obtenu, puisque de cousin il était passé gendre en quelques instants.

    Le lendemain et le surlendemain nouvelle visite, nouveaux compliments et nouvelle disparition de Mariette qui s’évanouissait comme une ombre, dès que l’Homme-Rouge montrait son nez à l’horizon. Il en fut d’abord surpris, puis contrarié et s’en ouvrit à la mère. « Ma fille, dit-elle, est timide et farouche ; elle a été élevée dans les bons principes, et la vue d’un homme, surtout d’un bel homme tel que vous, alarme toujours sa pudeur. Mais n’ayez souci ; je lui ferai la leçon. Revenez demain soir entre chien et loup, et je vous réponds qu’elle vous accueillera comme vous le méritez. Adieu, mon gendre ». L’homme-Rouge s’en retourna  en se frottant les mains et résolu à profiter de l’occasion pour frapper le grand coup et s’emparer de sa proie.

    Le jour d’après la mère Rabat-Joie fut fort occupée à des préparatifs qui n’étaient pas ceux des fiançailles : elle boucha avec soin la cheminée ainsi que toutes les ouvertures de l’unique pièce du rez-de-chaussée, ne laissant libre que la chatière pratiquée au bas de la porte. Dans l’angle le plus sombre était placé un vase plein d’eau bénite où trempait un rameau de buis. Mariette avait un rôle à jouer dans ce drame, rôle si effrayant, qu’aux premiers mots de sa mère elle devint pâle comme la mort et faillit lui désobéir pour la première fois de sa vie. Il ne fallut rien moins, pour l’encourager et la décider, que le serment qu’elle lui fit sur le crucifix de lui permettre, en récompense de sa docilité, d’aller s’enfermer dans un cloître, ce qui était depuis longtemps son désir le plus ardent.

    A l’heure convenue, l’Homme-Rouge, je veux dire le diable, arrive fringant et guilleret. La diablesse, je veux dire la mère Rabat-Joie, se tenait sur le seuil aimable, souriante et empressée. « Entrez, entrez, mon gendre, dit-elle ; ma fille est prête à tout ; vous n’aurez pas lieu de vous plaindre de son accueil. »

    Il entre sans méfiance, pendant que la mère Rabat-Joie, restée dehors, ferme derrière lui la porte à double tour. Mariette, debout dans un coin, le rameau de buis à la main, attend l’assaut, ferme et intrépide, car l’archange saint Michel la couvrait de son divin bouclier et lui inspirait un courage au-dessus des forces de son sexe. Au moment où le diable fond sur elle, il est accueilli par une aspersion d’eau bénite qui retombe sur lui comme une pluie de métal en fusion. Il pousse un rugissement de douleur et de rage, recule effaré, voyant trop tard le piège où il est tombé, et cherche anxieusement une issue pour échapper à l’averse de feu dont l’inonde le rameau bénit. Il court à la porte, elle est fermée à clé ; il vole aux fenêtres, elles sont barrées ; il s’élance vers la cheminée, elle est bouchée. Tout à coup, il aperçoit la chatière, se félicite de cet oubli providentiel, et se croit sauvé. Il se fait tout petit, tout petit, se pelotonne, passe comme un trait par l’étroite ouverture et tombe dans un sac que l’astucieuse commère y tenait étroitement collé du dehors. En un tour de main, la bouche du sac est liée, et voilà messire Satan pris comme une souris dans une souricière.

    Pour plus de précaution, la mère Rabat-Joie enroule solidement tout autour une forte corde, qui ôte tout mouvement au captif et ne lui laisse libre que la langue, dont il se sert pour menacer, jurer, sacrer et blasphémer.

     

    Elle ne s’en émeut guère et le regarde d’un air de mépris triomphant. Ah ! traître, s’écrie-t-elle, vil hypocrite, abominable imposteur ! Tu as cru me jouer et c’est moi qui t’ai mis dedans.

     

    Tu ne connaissais pas, malgré toute ta science, la mère Rabat-Joie ; il y a plus de malice dans son sac qu’il n’y eut jamais de tours et de diableries dans ton bissac. Ah ! tu voulais, serpent, emporter ma Mariette qui est la consolation et la joie de mes vieux jours ! On t’en fricassera des Mariettes. Quel joli gendre j’avais là et comme c’eût été honorable et distingué pour une femme à principes comme moi ! Attends, attends un peu ! je vais t’appliquer mon système d’éducation, car ta mère t’a bien mal élevé, sacripant ! » Et empoignant un manche à balai, elle décharge sur le sac et son contenu une si furieuse grêle de coups, qu’elle eût tué le diable, si le diable pouvait être tué. Malheureusement, il est immortel comme le mal.

    La nuit était tombée. La mère Rabat-Joie charge sur ses épaules encore solides son incommode prisonnier qui frétillait comme une anguille et criait à s’enrouer. Le mont de Cérisy était tout proche ; c’est là qu’elle dirige ses pas. Ce mont était alors couvert d’une végétation tellement dense et touffue, qu’elle n’eût jamais réussi à y pénétrer, si l’archange saint Michel ne lui avait pas ouvert la voie avec son épée pour la récompenser de la première et unique bonne œuvre qu’elle eût faite en sa vie. Elle atteint, hors d’haleine, le sommet aride et nu, où ne se posait nul pied humain, y dépose son fardeau et l’entoure de grosses pierres de peur d’accident.

    Le diable, dans cette fâcheuse extrémité, devient humble, doucereux et insinuant ; il appelle la mère Rabat-Joie sa chère amie et s’efforce de l’attendrir par les plus touchantes supplications. Autant eût valu chercher à attendrir un tigre. La chère amie hausse les épaules et lui jette ces mots ironiques : « Adieu, mon gendre, je vous souhaite une bonne nuit de noces. Heureux coquin ! que d’agrément vous allez avoir et comme vous allez faire des jaloux ! Adieu, amusez-vous bien et tâchez de ne pas vous enrhumer ». Puis elle dévale par le même sentier, sans plus se soucier de sa victime dont les mésaventures ne devaient pas se borner, ainsi qu’on le verra dans le cours de ce véridique récit.

    Le lendemain, la mère Rabat-Joie alla s’agenouiller devant l’autel de saint Michel et y consacra le rameau de buis bénit, qui avait mis en déroute le roi de l’abîme. La figure de l’archange lui parut illuminée de rayons et il lui sembla que le démon faisait une plus laide grimace et de plus affreuses contorsions qu’à l’ordinaire : cela ne la surprit pas. L’orgueil et l’ivresse de la victoire adoucirent un instant sa nature indomptable, et elle n’hésita pas à tenir son serment en permettant à sa fille de se donner à Dieu.

    Quelques semaines plus tard, Mariette entrait comme novice dans un monastère des environs. Mais les jours de la jeune vierge étaient comptés et la terre fuyait déjà sous ses pas. Cette fleur d’innocence et de pureté, qui languissait et s’étiolait dans notre atmosphère empestée, ne devait briller de tout son éclat et répandre tout son parfum que dans les jardins du Ciel. Le long martyre enduré sous une mère barbare avait miné ses forces ; les austérités du cloître achevèrent de les user. Elle s’éteignit doucement, au bout de peu de temps, en pardonnant à sa mère, et les anges fidèles, qui l’avaient consolée et soutenue dans le dur chemin de la vie, l’emportèrent morte sur leurs blanches ailes et la déposèrent au pied du trône de Dieu : il y avait une sainte de plus au Paradis.


    III

    Abandonné sans secours sur le sommet désert d’un mont, étroitement serré et emmailloté, exposé nuit et jour à la rigueur des intempéries, le diable se trouvait dans la situation la plus critique et la plus humiliante où fût jamais tombée une puissance déchue. Il pestait, maugréait, enrageait, pleurait, grinçait des dents, gémissait, se désespérait, séchait d’ennui, crevait de dépit, suffoquait de colère et de honte, et ne se soulageait un peu qu’en maudissant mille et mille fois toute l’engeance des filles d’Ève, toutes les normandes de Normandie et en premier lieu, la mère Rabat-Joie, ce monstre, cette harpie qui avait si indignement abusé de sa confiance et violé dans sa personne les droits sacrés de l’hospitalité.

    A l’aversion profonde qu’elle lui inspirait, se joignait maintenant, tout diable qu’il était, une frayeur extrême. La terrible volée de bois sec dont elle l’avait régalé, lui cuisait sur tout le corps, et il tremblait qu’elle ne revînt lui en servir une autre, celle-là de bois vert, très abondant en ces parages, pour qu’il pût faire la comparaison et juger de la différence. Mais elle s’en abstint par générosité naturelle et par grandeur d’âme.

    Quoiqu’elle affichât en toute occasion la haine et le mépris des hommes, la mère Rabat-Joie leur avait rendu, sans le vouloir, un inappréciable service, en les délivrant de leur plus cruel ennemi, de celui qui fut dès le principe l’auteur de tout mal, le tentateur des faibles, le corrupteur des bons, le grand semeur de zizanie, le fauteur des passions et des vices, l’instigateur des méfaits, le boute-feu des séditions et des guerres. Aussi, dès qu’il eût été réduit à l’impuissance et éloigné du théâtre de ses hauts faits, vit-on se produire, dans les idées, les sentiments et les mœurs, une transformation si générale et si merveilleuse, qu’il semblait qu’on retournât vers l’âge d’or. On eût dit le coup de baguette d’une bonne fée venant détruire l’œuvre perverse d’un mauvais génie.

    Les hommes cessèrent tout à coup d’être intempérants, dissipés et joueurs, les femmes d’être légères, médisantes et coquettes. L’union régna dans les familles, les hameaux, les cités. La fidélité conjugale, la pureté des mœurs, le respect pour les parents, le désintéressement, la bonne foi, la probité ne furent plus de vains mots. Les différends s’arrangèrent à l’amiable ; et même en Basse-Normandie, terre promise des gratte-papier et des plaideurs, on n’entendit plus parler de procès. Les juges oisifs baillaient d’ennui comme s’ils eussent été encore sur leurs sièges ; les avocats, condamnés au silence, se firent chartreux, et tous les suppôts de la chicane accomplirent des œuvres pies en expiation de leurs péchés.

    Plus de crimes, de vols, de guet-apens, de brigandage des gens de guerre, de tyrannie féodale, de révolte de serfs poussés à bout ; tout au plus, de loin en loin, quelque larcin commis par inadvertance ou quelque coup porté dans les ténèbres sans intention de nuire.

    A Domfront, ville de malheur pour ceux qu’on menait pendre, car on leur accordait à peine une heure pour se lester l’estomac avant d’entreprendre le grand voyage, à Domfront, dis-je, la potence devint un ornement inutile et les corbeaux des clochers et des tours y cherchèrent vainement leur pâture accoutumée.

    Le bourreau de Domfront, dont j’ai oublié le nom, était un homme doux, serviable, de joyeuse humeur et ami de la plaisanterie. Il se disait maître de danse, parce qu’il apprenait à ses clients à danser sous la corde dans la perfection ; il prétendait que sa potence l’emportait sur tous les pommiers et poiriers du Bocage, parce que ceux-ci ne donnaient des fruits qu’en automne, tandis que l’arbre de justice en portait de très mûrs en toute saison.

    Quand la besogne lui fit complètement défaut, ce brave homme perdit sa gaité et tomba dans la plus noire mélancolie. Il eût pu vivre honnêtement du métier de rebouteux où il était très habile ; mais il aimait passionnément son art, il regrettait ses chers pendus, et son désespoir fut tel qu’il se pendit lui-même.

    De même que les pendards manquèrent aux gibets, de même aussi les prétextes de guerre manquèrent à l’ambition des princes. Il soufflait de toutes parts comme une brise tiède de pacification et de concorde. Les épées rentrèrent au fourreau et les mains désarmées s’unirent dans une fraternelle étreinte. Les conquérants cessèrent de ravager et d’ensanglanter la terre, et la terre cessa de célébrer les exploits et la gloire des conquérants. Plus de tueries héroïques, de villes réduites en cendres, de troupeaux humains emmenés en servitude ; plus de soldatesque effrénée se ruant, comme une horde de démons, sur les populations inoffensives.

    On fut alors témoin d’un événement unique dans l’histoire, le règne trop court, hélas ! de la paix universelle. Ce beau rêve, qui ne prit corps que cette fois-là, a été depuis le thème de bien des discours, le sujet de bien des discussions, et il s’est trouvé récemment des esprits généreux et candides pour tenter d’en faire une réalité. Rien assurément n’est plus digne d’encouragement et d’éloges ; mais, tout en rendant hommage aux efforts et aux intentions de ces philanthropes émérites, je me permettrai de leur dire qu’ils n’atteindront jamais leur but par les moyens dérisoires et puérils qu’ils préconisent. Il n’y a, d’après mes faibles lumières, qu’un moyen pratique et sûr d’y parvenir, c’est celui qui fut imaginé par la mère Rabat-Joie et qu’elle sut appliquer avec autant d’à-propos que de succès.

    Le diable étant, en effet, l’éternel perturbateur de la paix entre les hommes, il importe avant tout, si l’on veut obtenir une paix durable, de le mettre dans l’impossibilité de la troubler. Je conseillerai donc aux vénérables apôtres de la paix universelle et perpétuelle, au lieu de s’attarder à des minuties, d’aborder la difficulté de front, de prendre le diable par les cornes, de le fourrer dans un sac et de l’y tenir dans une rigoureuse captivité. Mais surtout qu’ils veillent à ne pas le laisser échapper, car il recommencerait à faire des siennes et ce serait peut-être pis qu’auparavant.

    L’heureuse métamorphose qui s’était opérée dans les conditions morales de l’humanité, ne pouvait manquer de causer un juste étonnement et de mettre en éveil la curiosité publique. Tout le monde, en effet, fut frappé d’un changement si subit et si en dehors du cours naturel des choses, et chacun à l’envi tendait son esprit et aiguisait ses facultés pour tâcher de pénétrer la cause de ce phénomène psychologique. Mais ce fut en vain ; on eut beau hasarder des conjectures, former des hypothèses, on ne trouva aucune solution satisfaisante et il fallut jeter sa langue aux chiens.

    Afin de sortir d’embarras, on alla consulter les sophistes, gens très ferrés sur la métaphysique et qui dissertaient à ravir sur les effets et les causes. Les sophistes pérorèrent douze heures de suite sans reprendre haleine, parlèrent grec, latin et bas-normand, argumentèrent en *darii*, en *baroco*, en *baralipton*, remuèrent une montagne de textes, citèrent Aristote, Platon, Averrohès, Tertullien, Moïse, Hésiode, David et la Sibylle, l’Écriture et les Pères, la Loi et les Prophètes. Pour finir, car tout a une fin, même les divagations d’un sophiste, ils fournirent des explications tellement obscures, confuses, embrouillées, enchevêtrées, biscornues, stupéfiantes et abracadabrantes, que les auditeurs se sauvèrent, à moitié idiots, en se bouchant les oreilles.

    Il fut déclaré par sentence rendue dans les formes que les sophistes étaient des ânes bâtés, bons à porter les sacs au moulin, et qu’ils recevraient chacun une botte de foin à titre d’honoraires. Après quoi, l’on décida de s’adresser aux sorcières, personnes tenues en très haute considération, car elles passaient aux yeux du vulgaire pour savoir beaucoup plus que les sophistes et un peu moins que le diable qui avait été leur maître d’école.

    Les sorcières, s’étant fait payer d’avance en bonne monnaie ayant cours, se mettent vivement à la besogne ; elles rôtissent force balais, éventrent force crapauds, vont cueillir, au clair de lune, des herbes mystérieuses et des os de mort dont elles composent une étrange salade, marmottent des paroles cabalistiques et célèbrent des cérémonies bizarres pour lesquelles elles se font livrer une quantité fabuleuse de poules noires qu’elles mangent de fort bon appétit. Malheureusement pour ces filles d’enfer, elles avaient compté sur le diable pour les inspirer et leur dicter une réponse, et le diable étant empêché, comme on sait, elles ne firent que balbutier, bredouiller, ânonner, bafouiller, et restèrent honteusement à court. Convaincues de supercherie, de mensonge et d’imposture, elles furent rudement fessées, mais on leur fit grâce du fagot, ce qui était un signe non équivoque de l’adoucissement des mœurs.

    Après ce double échec, on fit partir des messagers pour aller interroger un vieil astrologue qui habitait près de Tinchebray une vieille tour en ruine, en compagnie des chats-huants et des chauves-souris. C’était l’homme le plus savant de ce temps-là et sa réputation était européenne, car elle s’étendait jusqu’à Falaise. L’astrologue, ayant caressé sa longue barbe blanche, commence par observer longuement les espaces célestes ; il se plonge dans de longs calculs, trace des figures avec un long compas et déclare d’un ton d’oracle que le phénomène sur lequel on l’interroge est dû à l’influence des astres et qu’il a pour cause première une conjonction favorable de je ne sais quelles planètes.

    Cette réponse est pour les messagers comme un trait de lumière ; ils demeurent en extase devant une science si profonde ; puis chacun s’en va répétant : « Il a raison ; ce doit être l’influence des astres ; c’est certainement l’influence des astres. » Et bientôt, de tous côtés, on n’entend que ces mots : « C’est l’influence des astres. »

    Pauvres gens qui, ayant le malheur de vivre à une époque d’ignorance et de barbarie, attribuaient aux astres une prétendue influence sur les choses d’ici-bas et allaient chercher très loin, au plus haut de la voûte des cieux, la raison d’un phénomène dont la cause était là, tout près d’eux, sans qu’ils eussent l’air de s’en douter !

    La mère Rabat-Joie dut bien rire en entendant vanter l’influence des astres, elle qui savait de quoi il retournait et qui eût pu, dès le premier jour, déchiffrer l’énigme mieux que tous les sophistes, toutes les sorcières et tous les astrologues ; mais elle était trop madrée pour en souffler mot, craignant non sans sujet que quelque curieux malavisé ne vînt rendre la liberté au vilain oiseau qu’elle avait tant d’intérêt à garder en cage.

    L’oiseau finit pourtant par en sortir, ou plutôt il en fut tiré, dans des circonstances peu ordinaires, par un personnage que je dois d’abord présenter au lecteur. Il se nommait le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille ; c’est ainsi du moins que le désigne l’anonyme, lequel ne fait pas difficulté d’avouer que ce n’était là qu’un sobriquet ou nom de guerre donné au Chevalier par ses compagnons de débauche ou de combat. Quant au vrai nom et au vrai titre, il refuse de les faire connaître par des motifs respectables de prudence et par égard pour la famille qui était l’une des plus puissantes de la noblesse normande.

    Le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille était un terrible sire, un colosse pour la taille, un Samson pour la force, et son aspect était si truculent qu’à l’exemple de certain gascon de Gascogne, il ne pouvait se regarder dans un miroir sans se faire peur à lui-même.

    Il ne fut pas toujours sans sou ni maille ; il avait été au contraire extrêmement opulent ; mais, si grande que fût sa fortune, ses passions et ses appétits étaient plus grands encore et l’entraînèrent à toute sorte d’excès, de prodigalités et de désordres. Le vin, le jeu et les filles étaient la seule trinité à qui il rendît assidûment hommage. Il mangeait son blé en herbe, ses bois jusqu’à la racine, ses villages morceau par morceau et dissipait en quelques semaines le revenu d’une année.

    Il existait alors en Normandie un vieux proverbe à l’usage de la bourgeoisie et des petites gens, lequel disait : Qui paie ses dettes s’enrichit. Le Chevalier, en avance sur son temps de plusieurs siècles, y avait introduit une très légère variante et lui fit dire : Qui s’endette s’enrichit. C’était presque la même chose, mais c’était tout le contraire.

    Je sais fort bien que la maxime : Qui s’endette s’enrichit, malgré son air absurde et paradoxal, forme aujourd’hui la base du système économique des nations civilisées. Toutes la mettent en pratique, empruntant à outrance, afin de s’enrichir sans mesure, et l’on en voit qui, chargées d’une dette écrasante, marchent aussi allègrement que le géant Atlas, lorsqu’il portait la Terre sur ses robustes épaules. Seulement, gare à ne pas broncher, car toute chute serait mortelle.

    Ce système, excellent pour les nations, parce qu’elles ont les reins solides et des grâces d’état qui leur sont spéciales, ne vaut absolument rien pour un particulier, fût-il baron ou duc, et notre imprudent Chevalier ne tarda pas à en faire la triste expérience. Il n’eut pas de peine à trouver des prêteurs, car s’il n’existait pas encore des banquiers israélites, il y avait à foison des usuriers juifs, gens forts expéditifs à plumer tout volatile qui s’abattait à portée de leurs mains rapaces.

    Il put donc s’endetter à son aise ; mais, chose surprenante, il n’en devenait pas plus riche. Bien au contraire, il s’appauvrissait de plus en plus, laissant chaque jour quelque plume grosse ou petite aux doigts crochus des fils d’Abraham : c’était un champ, un pré, un moulin, un coin de forêt, une métairie ou quelque autre lambeau de ses vastes domaines. A dire vrai, il n’y songeait guère et ne s’en inquiétait pas, tellement il était occupé à mener un train d’enfer et une vie bruyante et folle, tant il était absorbé par les plaisirs et les fêtes, par les parties de chasse, le jeu et les orgies.

    Enfin vint le moment fatal où, tout le reste ayant été dévoré, il lui fallut aliéner le dernier débris de son opulence, le château de ses nobles ancêtres, qui durent tressaillir d’horreur dans la tombe. Il se trouvait désormais entièrement ruiné, dépouillé, mis à nu, et cet aigle féodal, naguère effroi des campagnes, présenta l’aspect lamentable d’un grand oiseau déplumé à qui il ne restait qu’un bec énorme et des serres démesurées.

    Bec et serres ne demandaient qu’à s’enfoncer  dans une proie vivante et le Chevalier résolut de se servir de ces armes redoutables pour regagner sur les chrétiens ce que lui avaient pris les juifs. Sentant renaître en lui les instincts belliqueux de sa race, il recrute une bande d’aventuriers, de malandrins et de désespérés, tous gens de sac et de corde disposés à devenir des héros, se met à leur tête, dit adieu à son ingrate patrie et s’en va au loin offrir ses services aux rois et aux princes engagés dans des guerres.

    Aux combats et aux assauts il déploie une bravoure extraordinaire, toujours le premier à l’attaque, toujours le premier sur la crête du mur assailli. Le Chevalier et sa troupe passent comme une trombe à travers la bataille, renversant tout ce qui leur résiste et jonchant le sol de morts et de mourants.

    Après la victoire, le butin. Malheur aux populations qui se trouvent sur le passage de la bande infernale ! Elle ne respecte rien, ne connait ni amis ni ennemis, met tout à feu et à sang, viole, dévaste, massacre, emporte ce qu’elle peut et détruit le reste. La terre sur ses pas se change en désert.

    Cependant, contre toute attente, l’heure de la pacification générale a sonné. Il faut, la rage au cœur, s’arracher à la curée, renoncer aux combats et aux conquêtes, plier bagage et reprendre le chemin oublié de ses foyers. C’est ce que fait le Chevalier qui, parti pauvre pour la guerre, revenait aussi pauvre qu’il était parti ; et ce n’était pas, croyez-le bien, faute d’avoir volé, pillé et saccagé autant et plus que n’importe quel chef de bande, mais parce que l’or se fondait comme la neige entre ses mains prodigues.

    Voyageant à pied, car il s’était vu réduit à vendre son cheval, il se dirige vers le pays de Tinchebray, où il espérait trouver un asile, et arrive un beau matin au pied du mont de Cérisy qui, dressant sa masse sombre, lui barrait audacieusement  la route. Tout autre l’eût contourné, en prenant à droite ou à gauche ; mais le fougueux Chevalier abhorrait les détours, ne reculait devant rien et s’irritait contre tout ce qui lui faisait obstacle. Il crie au mont de se ranger ; le mont ne bouge pas. Eh bien, qu’à cela ne tienne, il lui passera sur le corps et lui fera sentir la vigueur de son bras ; il en a vu bien d’autres. Et le voilà qui se précipite sur le mont, furieux et le fer levé.

    Les fourrés impénétrables qui en hérissent les flancs ne lui opposent qu’une fragile barrière. Que pourraient-ils contre un preux habitué à traverser les forêts de lances et de piques ? Il se jette au plus épais, s’ouvre un chemin à grands coups d’épée qui retentissent jusqu’au fond de la gorge où roule le Noireau, et luttant victorieusement contre cette nature rebelle, il avance, monte, grimpe, gravit et atteint enfin le sommet, où ses regards tombent sur un objet informe qui remue et qui geint. Il s’arrête stupéfait.

    « Quelle est cette bête-là ? » se demande-t-il et, se penchant à terre, il reconnaît un sac soigneusement ficelé et quelque chose dedans qui s’agite et fait effort pour sortir. Il essaie d’entr’ouvrir le sac ; mais une vapeur méphitique qui s’en échappe, manque de le renverser et il le referme aussitôt. « Quelle est cette bête puante et nauséabonde ? » se demande-t-il de rechef. O prodige ! la bête se met à parler d’une voix dolente et faible comme celle d’un moribond. « Brave Chevalier ! murmure la voix, je t’en conjure par tout ce que tu as de plus cher sur la terre et en enfer, ouvre, ouvre vite ce sac où j’étouffe. Rends-moi la liberté et je te récompenserai dignement. »

    « Par les cornes de Belzébuth s’écrie le Chevalier, ta voix est celle d’un chrétien, mais tu ne l’es pas, je le jurerais, car un chrétien eût crevé dans une si étroite prison. Tu es certainement le diable et je suis ravi de faire ta connaissance. Mais, dis-moi, tison d’enfer ! par quel hasard es-tu ici à faire pénitence comme un anachorète, au lieu d’être à courir le monde en semant la discorde et en nous taillant de la besogne à nous autres, gens de guerre et de proie ? Qui t’a fourré dans ce sac ? »

    « Une femme, répond le captif, presque une belle-mère, car j’étais sur le point de lui donner un nom si doux. Cette créature infâme m’a tendu un guet-apens et m’a apporté garrotté dans cette solitude. Mais ouvre, ouvre vite, guerrier magnanime ! car j’étouffe. »

    Le guerrier magnanime, que cette aventure réjouissait fort, se livre à un accès de fou rire que le diable ne partage pas. « Ah ! tu t’es frotté aux femmes ! lui dit-il, il t’en a cuit et c’est bien fait. Ne savais-tu donc pas, imbécile, qu’une femme a plus de malice qu’un démon ? Et tu voulais même te marier, comme si tes cornes n’étaient pas assez longues ! Allons, je vais avoir pitié de toi et te tirer de ce mauvais pas, car tu as été diablement naïf et d’ailleurs il est écrit qu’il faut secourir ses semblables. » Et pendant que d’une main il se bouche les narines, de l’autre il coupe les cordes et ouvre le sac.

    Le diable en émerge lentement, engourdi, perclus, efflanqué, aminci, fluet, desséché, ridé, momifié, tanné, ratatiné et semblable à une de ces longues andouilles, qui pendent noires de suie aux vastes cheminées du Bocage. Il aspire l’air avec délices, s’étire, s’allonge, se secoue et tâche de dégourdir ses membres martyrisés ; sa force et son agilité reviennent par degrés ; il hasarde un pas, puis plusieurs autres, essaie une cabriole et s’apprête à prendre son vol ; mais il ne peut aller loin. Le Chevalier, qui avait son idée, l’avait saisi par la queue qu’il serrait fortement.

    - Tout doux, camarade, tout doux, lui dit-il. Ne sois pas si pressé ; on dirait que tu as le feu au derrière, toi qui le mets aux autres. J’ai infiniment du plaisir dans ta compagnie, et l’on gagne du reste à fréquenter les personnes de ta condition, quoiqu’elles ne sentent pas la rose. Avant de me priver de ta société, je dois t’adresser une prière que, je n’en doute pas, tu t’empresseras d’exaucer.

    - Fais vite et lâche-moi. J’ai hâte d’aller à mes affaires que j’ai négligées depuis un bout de temps. On me réclame de tous côtés et le monde soupire après moi.

    - Le monde soupire après toi comme l’agneau après le loup ou le débiteur traqué et aux abois après son féroce créancier ; il ne s’apercevra que trop tôt de ton retour. Ecoute-moi, voici ce que j’avais à te dire. Tu me dois de la reconnaissance, non pour t’avoir délivré, – je ne l’ai pas fait, crois-le bien, pour tes beaux yeux – mais à cause du grand nombre d’âmes que je t’ai envoyées à mainte reprise. Je conviens qu’elles étaient fort laides, car c’étaient des âmes d’aventuriers ; mais je ne pouvais mieux faire, à moins de t’envoyer la mienne dont tu n’aurais pas voulu. D’autre part, je n’ai pas à t’apprendre que je suis gueux comme le saint homme Job dont les compatriotes m’ont plumé tout vif, et tu le sais d’autant mieux que je te loge depuis longtemps dans mon escarcelle, ce dont je me serais volontiers dispensé. Fais-moi donc la grâce de me prêter sur ma mine une petite somme qui me permette de redorer mon blason et de satisfaire mes goûts qui, je t’en préviens, sont immodérés et insatiables. J’ai dit.

    - Fort bien, lâche-moi et je t’apporterai tout l’argent que tu pourras désirer.

    - Nenni, nenni ; nous sommes normands en Normandie, je veux dire méfiants et soupçonneux. Nous pratiquons le sage proverbe : Mieux vaut tenir que courir ; et puisque je te tiens par le bon endroit et que je n’ai pas envie de courir après toi, ce qui serait courir après le vent, je ne te lâcherai que quand tu auras lâché la petite somme que j’implore de ta générosité.

    - Mais que veux-tu que je te donne, bourreau ? Tu le vois, je n’ai rien ; j’ai eu des malheurs ; j’ai éprouvé de grosses pertes d’argent. Le percement du Panama infernal a percé et vidé ma bourse, et elle est restée aussi plate que si tous les juifs de l’enfer y avaient passé. Regarde-moi, ai-je l’air d’un Crésus ? Je ne suis qu’un pauvre diable sans sou ni maille comme toi.

    - A d’autres avec tes jérémiades, faux indigent ! Je n’en croirai pas un traître mot, car tu es le père du mensonge et tu mens par la gorge comme un chevalier félon. Tu dois avoir un magot quelque part, et tant que tu ne l’auras pas déposé tout entier entre mes mains loyales, je m’attacherai à ta queue et ne te lâcherai pas d’une semelle. »

    Le dialogue se poursuit sur ce ton et menace de s’éterniser. L’un exige avec arrogance, l’autre refuse avec opiniâtreté. C’est à qui n’en démordra pas, à qui montrera plus d’obstination. Jamais breton bretonnant ou mulet d’Auvergne ne fit preuve d’un entêtement pareil. Las enfin de piétiner sur place, ils se mettent en route sans but déterminé, le diable faisant des efforts inouïes pour se dégager et le Chevalier lui marchant sur les talons, la queue du prisonnier serrée dans sa main comme dans un étau, et lui caressant de temps à autre l’échine à coups de plat d’épée, qui seuls avaient le don de le ramener au calme convenable à sa situation.

    Le Chevalier avait un poignet de fer ; il eût arrêté instantanément une meule de moulin ou un attelage de six chevaux ; et d’ailleurs rien ne double les forces et l’énergie d’un homme comme le manque d’argent et le besoin impérieux de s’en procurer. Le diable ne put jamais lui faire lâcher prise, et il fallait que sa queue fût solide comme un câble pour ne s’être pas rompue dix fois sous les violentes secousses qu’elle eut à supporter.

    Tous deux errent ainsi longtemps à l’aventure. Ils vont en amont, en aval, à droite, à gauche, en avant, en arrière, décrivent des courbes et des zigzags, franchissent des rivières, traversent les hameaux et les bourgs, tandis que les bons villageois se mettent curieusement aux portes ou interrompent leurs travaux champêtres et regardent passer, tout ébahis, le Prince des ténèbres respectueusement suivi de son fidèle caudataire.

    Si l’on s’en rapporte à la tradition, c’est pendant cette pérégrination fantastique que le malin esprit creusa, par vengeance et malice, les innombrables fossés qui, dans ce pays-là, usurpaient le nom de chemins et qui, fangeux en toute saison et presque impraticables, ont fait damner durant des siècles charretiers et piétons.

    Quoiqu’il fût parti avec la ferme volonté de ne pas céder, le diable éprouva en route divers accidents qui ébranlèrent sérieusement sa résolution. A Landigou il faillit se casser le cou ; à Landisacq il perdit son bissac ; à la Lande-Patry il le retrouvit ; à Claire-Fougère il chut sur le derrière ; à Crasménil il chut sur le nombril ; à Mille-Savates il s’écorchit les pattes ; à Sainte-Honorine il faisait piteuse mine ; à Echalou il était à bout ; enfin à Monci il cria merci.

    Il était temps, car la queue, si dure, fibreuse et coriace qu’elle fût, menaçait de se détacher à force d’être secouée et tiraillée en tout sens. Et que serait devenu son prestige s’il avait eu le malheur de la perdre ? Se figure-t-on un diable sans queue ? On l’eût partout montré au doigt ; il eût été honni, déshonoré, exclu de la bonne société, livré à la risée publique, et il n’aurait eu d’autre ressource que d’abdiquer et de se faire ermite, quoiqu’il se sentît encore trop jeune pour cela.

    Il se résigna donc, fit taire son orgueil ulcéré, se rendit à discrétion et, toujours tenu en laisse, conduisit son acharné persécuteur à une carrière abandonnée du mont Crespin, entre Flers et Tinchebray, où, dans une excavation habilement dissimulée, il lui montra un trésor qui eût fait la fortune d’un monarque. C’était sa cassette particulière ; c’est là qu’il puisait, quand, pour faire réussir un plan, il avait besoin de corrompre, de suborner et de séduire. Ce trésor provenait d’un juif de Germanie qui avait été son ami intime et dont il favorisa les opérations véreuses jusqu’au jour où, le trouvant riche à point, il lui tordit le cou et s’appropria son bien.

    Le Chevalier fut ébloui à la vue de tant d’or, mais il fut surtout enchanté d’en connaître l’origine et de pouvoir prendre sa revanche sur la race papelarde et pillarde qui l’avait détroussé. Pour témoigner sa reconnaissance au diable, il lui applique plusieurs coups de pied bien pointus sur la double proéminence postérieure ; puis il le lâche. L’autre, sans demander son reste, ne fait qu’un bon jusqu’aux frontières de son empire ; mais il n’y rentre pas en triomphateur, comme il s’en était flatté, lorsqu’il espérait y emporter une sainte toute en vie. Berné et battu par la mère Rabat-Joie, battu et dévalisé par le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille, il s’y glisse tout penaud, l’oreille basse et la queue entre les jambes, et s’en va soigner son royal appendice meurtri et disloqué, ce qui donne encore quelque répit aux humains.

    Son retour dans le monde fut signalé par un coup d’État, qui mit fin au règne éphémère du bien et restaura l’empire antique du mal. Le vice reparut ; les instincts pervers se réveillèrent ; l’ambition gronda de nouveau et la discorde ralluma ses torches. Les désordres, les révolutions et les guerres reprirent de plus belle et se déchaînèrent avec une fureur croissante. Ces fléaux n’ont cessé depuis lors de désoler la terre et ils ne disparaîtront que le jour, très éloigné, je pense, où les apôtres de la paix universelle auront trouvé le secret de nous ramener l’universelle concorde, qui fait universellement défaut dans ce pauvre Univers.

    Le Chevalier se  disposait à recommencer sa vie de scandale, lorsqu’il fut tout à coup éclairé par un rayon de la grâce divine. Il se convertit et renonça à la voie de perdition pour entrer dans celle de la pénitence et du salut. Les prières d’une sainte qui, du haut du Ciel, veillait sur ceux qui, même par des moyens peu corrects, combattaient l’esprit des ténèbres, contribuèrent beaucoup à cette conversion qui fit grand bruit dans toute la chrétienté et fut mise au nombre des miracles.

    Devenu aussi humble et doux qu’il avait été orgueilleux et violent, il prit l’habit religieux dans l’abbaye de Belle-Etoile, consacrant à de bonnes œuvres et purifiant par ce pieux emploi le trésor qu’il avait extorqué au diable et qu’il n’eut garde de lui restituer. Il fit d’importantes donations à cette abbaye et de riches présents au monastère du Mont-Saint-Michel ; il bâtit des églises, créa des léproseries et des hospices, racheta des captifs et fonda sur le mont de Cérisy un ermitage en commémoration de la victoire qu’il avait remportée sur Satan et qui fut la dernière et la plus éclatante de ses victoires terrestres. Il mourut comme un saint après avoir longtemps vécu comme un damné.

    Si les prières de Mariette furent assez puissantes pour obtenir la conversion du Chevalier, elles n’eurent pas le même effet sur sa mère, dont la méchanceté, défiant la grâce et les miracles, augmentait à mesure qu’elle avançait en âge et qui de diablesse aux trois quarts devint diablesse tout-à-fait. Aussi, lorsqu’elle délivra le monde de sa présence, s’en alla-t-elle tout droit vers l’enfer, seul endroit digne de lui offrir un gîte. Mais Satan, instruit de son approche, fut saisi d’une telle épouvante, qu’il fit fermer et barrer à la hâte toutes les portes de l’infernal séjour. La mère Rabat-Joie se trouva dans le plus grave embarras. Aller au Ciel ? Il n’y fallait pas songer ; elle en eût fait un enfer, et d’ailleurs le portier saint Pierre lui en interdisait sévèrement le seuil. Retourner sur la terre ? Cela présentait des difficultés. Elle prit donc le seul parti qui restât à prendre : elle se réfugia dans le Purgatoire.

    La façon dont le Chevalier Sans-Sou-ni-Maille gagna un trésor en s’attachant à la queue du diable fut d’un exemple pernicieux, car elle suscita et suscite encore une foule d’imitateurs. Tous les besoigneux, les gens criblés de dettes, les commerçants dans la détresse, les spéculateurs ruinés, les joueurs malheureux, les auteurs crottés, les viveurs sans le sou, les ménages dans la gêne, tous ceux, en un mot, que tourmente le mal d’argent, et ils se nomment légion, se sont accrochés désespérément à cette queue mirifique, dans la persuasion qu’elle les tirerait de misère et les mènerait à la fortune. Aucun n’a découvert le moindre trésor ; tous, au contraire, ont peiné comme des galériens, sué, ahané, reçu force ruades et coups de corne. Mais, en dépit des déceptions et des déconvenues, ils y reviennent sans cesse comme les mouches au gâteau de miel. Tellement est puissant et tenace l’espoir de trouver de l’argent chez eux qui en sont dépourvus !

    Et maintenant, comme à toute histoire, conte ou légende, il faut une moralité, j’énoncerai la mienne sous la forme d’un conseil amical à l’adresse de ceux qui auront eu la bonté de me lire et la patience d’aller jusqu’au bout.

    Soyez, leur dirai-je, économes, sobres et prévoyants ; ménagez vos ressources ; mesurez vos dépenses à vos moyens ; ne cédez pas aux entraînements du jeu ; fuyez les cafés, brasseries, estaminets et autres lieux de dissipation et de buverie, où s’engloutit tant d’argent péniblement gagné ; tenez-vous en garde contre les coupeurs de bourse qui vous guettent au coin d’une réclame alléchante ou d’un prospectus insidieux ; ne risquez pas votre faible nacelle sur cette mer perfide de la finance, toute peuplée d’écueils, de requins et de forbans ; ne souffrez pas que vos fils compromettent votre fortune par leurs folies, que vos femmes et vos filles vous ruinent en parures frivoles et en toilettes extravagantes ; faites enfin tout au monde pour ne pas être réduits à la tâche ingrate, fatigante, écœurante et , en somme, inutile de tirer le diable par la queue.

    A. ALMAGRO.


    retour
    table des auteurs et des anonymes

     


    votre commentaire
  •  

     

     

     

      Les femmes, sous l’occupation, ont tenté par tous les moyens de conserver l’élégance et le bon goût attribués aux françaises, malgré les restrictions et les pénuries.

     

    Elles ont, par tous les moyens (récupérations, raccommodages…) essayé de s’habiller en suivant la mode et les codes de bonne conduite

     

     

     

      

    (« Toute femme, quelque soit son appartenance sociale, doit porter des gants, un chapeau et des bas, sous peine de contrevenir aux règles de bonnes manières qui régissent les convenances féminines. »,

    Dominique Veillon,

    La mode sous l’occupation.).

     



    Robe


    Des robes à la coupe simples, marquées à la taille, avec manches longues ou courtes (pas de bretelles) et sans décolleté. Souvent des boutons sur toute la longueur sur le devant, et des épaulettes.


    Imprimés assez petits : rayures, pois, fleurs etc… 
    Tissus : tweed, Jersey, laine, coton etc…
    Longueur : aux genoux, ou légèrement au dessus.

     

     

    Jupe :


    Des jupes taille haute, coupe droite ou légèrement évasée, ou jupe de tailleur.

    Couleurs unies, plutôt foncées.
    Tissus : tweed, Jersey, laine, coton etc…
    Longueur : au genoux, ou légèrement au dessus.

     

    Chemisier :


    Chemises à manches longues ou courtes. Pas de décolleté, pas d’épaules apparentes. Epaulettes, manches bouffantes. 

    Couleurs unie.
    Veste de tailleur assortie à la jupe. (Très à la mode)

     

     

     

    Collants plutôt BAS


    En 1944 : les femmes portaient des bas avec la couture apparente à l’arrière. Mais à cause de restrictions, les bas deviennent des produits rares.

    Les femmes se dessinaient alors une ligne au crayon le long de la jambe, simulant la couture, pour faire croire qu’elles en portaient.
     

     

    En pratique :

    un trait de crayon, ou des collants de couleurs chairs suffisent.

     

    Sac :


    Sac de petites taille, en bandoulière ou à porter à la main. 

    Forme simple.
    Sac en bois, en cuir, en tissus.

     

     

     

    Chapeau :


    Chapeau de petite taille ou large.

     

    Gilbert Orcel (Millinery) 1947 Fashion Photography Hat, Violette Cornille:  


    En feutre ou en paille.

     


    Accessoirisé avec voilette, ruban, fleurs, accessoires…

    (toutes les excentricités sont permises !)
    Beret

     

    Chaussures


    Talons carré, bout rond.

    Semelles en bois ou en paille, compensées.
    Brodequins, derbys, richelieu, espadrilles…


     

     

     

     

    Accessoires :


    Gants : unis, en tissus , en dentelle, en jersey ou au crochet.

     

     

    Coiffure :


    Bouclés ou attachés en chignon avec un chapeau.

    Coiffure plus sophistiquée sans chapeau.

     

    mode 1940 | Médias - Qwant  

      

    La mode des années 40 est rythmée par les événements géopolitiques de l’époque. Pour comprendre les grandes tendances, il faut distinguer trois points de repère:

    la guerre, la libération et l’avènement du New Look de Christian Dior. 
    ... 
    1940. Le début de la décennie est marqué par la Seconde Guerre Mondiale. Les maisons Chanel et Vionnet ferment leurs portes, même si d’autres ateliers

    (Lucien Lelong, Elsa Schiaparelli) restent ouverts.

     

    Il s’agit pour eux de préserver la tradition française de la couture sous l’occupation.

      

    Les restrictions qu’impose la guerre ne permettent pas à la mode de créer des nouvelles tendances. Les premiers tickets de rationnement apparaissent en 1941 :

     

    ils concernent dans un premier temps l’achat de produits textiles

     

      

      

    de la guerre, il est de bon ton d’adapter soi-même ses tenues à son rythme de vie.

     

    La silhouette féminine du début des années 1940 a les épaules larges, la femme porte des robes raccourcies, à la taille serrée et ceinturée, et à manche ballon.

     

    Petit à petit, les gros manteaux sont abandonnés pour laisser place à la veste, telle celle des hommes, souvent portée sur plusieurs couches.

     

     

    MODE sous l'occupation - Années 40:

    Les premières semelles compensées apparaissent pour allonger la silhouette féminine. 

      

    Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, l’industrie de la mode et du textile est mal en point. Les Français cherchent désespérément à s’amuser et la mode des années 40 s’adapte à la vie mondaine retrouvée.

     

    Les femmes renouent avec la féminité : elles portent de grandes robes sous des capes, leurs épaules sont souvent nues et l’on entrevoit leur poitrine grâce au décolleté en U.

      

    Progressivement, les jupes s’allongent, jusqu’à atteindre, dès février 1947, quelques centimètres au-dessus des chevilles.

     


    Le 12 février 1947, le Tout-
    Paris découvre la collection 

    Corolle d’un certain Christian Dior qui vient d’ouvrir sa maison de couture. Les acteurs de la mode des années 1940 assistent à une mini-révolution :

     

    les jupes sont à peine à trente centimètres du sol, la taille est extrêmement marquée ce qui met la poitrine en avant et les épaules s’arrondissent : c’est le New Look.

     

    Christian Dior crée des femmes fleurs, il répond aux rêves de féminité des Françaises.

      

    Très vite, l’Europe et l’Amérique succombent à la femme Dior. Alors que les tickets de rationnement sont toujours en service (ils le seront jusqu’en 1949), Christian Dior choque : il utilise près de 20 mètres de tissu pour la confection d’une robe, quand auparavant il ne fallait en compter que

    3. Cela n’empêchera pas son New Look de s’imposer à travers le monde et d’être une des tendances dominantes de la décennie suivante. 


    Elodie Petit

      

      

    Astuces 


    Pour les fumeuses : cacher le filtre de la cigarette sur le photos.

     

     

     

    Durant le conflit, l'heure est à la sobriété mais, après la fin du rationnement, le New Look connaît un immense succès.

    La Seconde guerre mondiale impose de lourdes restrictions qui touchent également l’habillement. Les matières premières sont rares et rationnées ; la plupart des ateliers de confection, tenus par des familles juives, ferment ou passent dans la clandestinité, à moins d’accepter un administrateur allemand.
      
    Ceux qui fuient Paris se réfugient à l’étranger ou bien, jusqu’en 1942, en zone libre, notamment à Nice et Marseille ; ce qui fait du sud de la France, après la guerre, le plus important centre de confection hors de Paris.

    Sobriété, économie et emprunts au vestiaire masculin

    En raison des circonstances, le temps est à la sobriété. Il n’est pas rare pour les femmes d’emprunter des pièces de la garde-robe de leur mari. Au début, elles se contentent de retailler les manteaux d’homme, puis elles adoptent aussi les pantalons.
      
    Avec la pratique de la bicyclette, elles retrouvent la jupe-culotte et portent leur sac en bandoulière.
      
    Comme durant la Première guerre mondiale, les femmes, qui reprennent une grande partie des responsabilités normalement réservées aux hommes, ont donc de nouveau accès à des tenues pratiques, adaptées à leurs activités.
      
    Suivant le modèle militaire masculin, les épaules s’élargissent.
     
     
    La taille est accentuée ; les chaussures ont des semelles compensées.
      
    Pour des raisons économiques, les jupes et les robes raccourcissent et on utilise le moins de tissu possible ; la jupe « paysanne » est constituée de deux ou trois carrés imprimés.
      
    Les ornements sont réduits au maximum, ou purement et simplement supprimés.

    On tricote beaucoup et on utilise toutes sortes de matériaux, tel le papier journal, notamment pour les chapeaux, qui sont extravagants en 1940 avant de rétrécir, voire d’être abandonnés.
      
    Les sacs sont souvent fabriqués en tissu, le cuir étant devenu rare. Ils sont assez grands pour pouvoir contenir le ravitaillement.
      
    Les ceintures sont aussi conçues à partir de matériaux divers, comme des plaquettes de bois décorées à la main ou des galons brodés. Tous ces accessoires permettent des variations sur des tenues peu nombreuses.

    Les bas de soie, interdits, sont remplacés par des socquettes ou des bas de laine ; ou bien on se teint les jambes.
      
      
    L’été, on sort jambes nues, ce qui aurait été auparavant jugé scandaleux.

    Les femmes portent les cheveux longs, une mèche roulée sur le front, ou en chignon. Le turban connaît un grand succès car il cache efficacement les cheveux.

    La haute-couture et les réactions face à la guerre

    La haute-couture parisienne s’adapte à l’occupation.
      
    Certaines maisons cessent leur activité, mais la plupart la poursuivent, prétextant plus tard s’être lancés dans l’extravagance pour ridiculiser les Allemandes ;
      
    en réalité parce que la société aisée franco-allemande mène une vie sociale insouciante durant le conflit.
     
     
    1946  photo by Constantin Joffe    Model is wearing Lilly Daché's toast-colored bare-browed sailor hat with a tangerine bow.:

    Les Allemands tentent de transférer les principales maisons à Berlin ou Vienne, mais les dirigeants de la chambre syndicale de la couture résistent.
      
    Certains couturiers expriment même leur hostilité à la guerre dans leurs créations. Madame Grès (1903-1993) présente ainsi sa première collection de la période d’occupation aux couleurs nationales françaises !

     

     
    Autre mouvement de réaction face à la guerre, les zazous apparaissent en 1942. Amateurs de jazz, ils suivent les modèles vestimentaires anglo-saxons.
      
    Disposant de moyens financiers, souvent grâce au marché noir, ils aiment les tenues chères et élégantes : pantalons larges, vestons longs et cintrés, chemises à col dur et montant, cravates et chaussures en cuir à grosses semelles.
      
     
    revue le petit ECHO DE LA MODE n°5-8 année 1945, février:
      
    Leurs cheveux sont bouffants sur le dessus de la tête, en opposition aux coiffures rasées militaires. Quelques jeunes filles suivent aussi cette tendance.
      
      
      
     

    « Tant qu’il y aura un désir de changements et un goût pour le rêve – La mode existera . »

     

    Vogue 1940

     

    1940s Fashion

     

      

     

    Les années quarante

     

    Le début de la Seconde Guerre mondiale a changé la face du monde.

     

    Avec leurs maris parti au front, les femmes ont du subvenir aux besoins de la famille en travaillant.

     

    Le travail des femmes a eu un grand impact sur la mode de l’époque. Après des décennies d’opulances, de libertés, et décadence, un sentiment de responsabilité et de conscience sociale est né auprès de ces dernières. Frappant ainsi le monde de la mode, et les poussant à créer des vêtements utiles et moins extravagants.

     

    Art et Culture

     

    La musique des années 40 avait pour but premier de distraire et d’encourager les gens durant cette période de guerre. Le style musical le plus courant était de « Big Band », et la liste des musiciens célèbres de l’époque comprenait Benny Goodman et Count Basie.

     

    La musique des années 40 a influencé plusieurs genres musicaux notamment le « Rock & Roll ».

     

    A la mort de Georges Vuitton en 1936, Gaston-Louis Vuitton prit le contrôle de l’entreprise. Durant l’occupation allemande ,

     

     

    Louis Vuitton a collaboré avec le régime de Vichy française dirigé

    par le Maréchal Pétain et les nazis.

     

    Ceux-ci qui étaient responsables de la déportation des juifs français vers les camps de concentration allemands.

     

    Louis Vuitton a montré son support en ouvrant une usine dont le seul but était de produire des produits glorifiant le gouvernement de Pétain, ce qui permit à l’entreprise d’augmenter ses revenus.

     

    Helmut Newton était un photographe de mode austr / allemand connu pour ses photographies en noir et blanc. Au cours des années quarante, ses œuvres sont apparues dans de nombreux magazines de mode tels que Vogue, Jardin des Modes, Elle, la Reine, ou encore Marie-Claire…

     

    Le Rationnement

     

    Le rationnement a été introduit afin d’assurer une juste indemnité aux citoyens britanniques. Le fait de rationner la nourriture, les vêtements ainsi que les chaussures, a forcé les femmes à ne porter uniquement ce qu’elles avaient déjà dans leur garde-robe.

     

    En 1942, le gouvernement britannique a introduit une loi en vertu du Décret de vêtements civils, qui interdisait l’embellissement les vêtements à la vente.

     

    De ce fait, le gouvernement voulait soutenir un style modeste et utile, encourageant l’usage de plis, de poches, de boutons…

     

    Tout acte contraire à ce décret était considéré comme illégal et anti-patriotique.

     

     

     

    1940s Fashion

     

    Les Formes et Silhouettes

     

    Comme le rationnement a frappé à plein fouet, il ne restait plus que quelques alternatives notamment les robes bon marché.

     

    L’idée de vêtements fonctionnels est devenue essentielle, cela c’est notamment observé dans le choix de tissus simples.

     

    Les moyens de transports ont changé, les gens favorisaient plus souvent les bicyclettes, ce qui conduit les femmes à porter des jupes plus de plus en plus courtes et moins restreinte. Le costume est devenu également très populaire parmi les femmes de cette époque.

     

    Celui-ci était tellement répandu, qu’il a même été acceptable pour les mariées de le porter. Cela est du à son aspect fonctionnel en raison de la nécessité d’une tenue de travail.

     

    Les chaussures à talons plats étaient portées avec des vestes à épaulettes carrées qui ressemblaient à la coupe d’un uniforme.

     

    1940s Fashion Modèle "New Look" de Christian Dior (1905-1957)

     

    A la fin de la guerre, les femmes voulaient s ‘éloigner de l’austérité de cette période sombre et cette évasion incluait également les vêtements associés à celle-ci.

     

    Christian Dior a annoncé la fin du rationnement en insistant sur l’excès de matériaux et en utilisant des tissus somptueux. Un choix qui s’est avéré très audacieux pour l’époque.

     

    Le « New Look » de l’été 1947 mettait en avant diverses parties de l’anatomie de la femme tels que le buste, la taille et les hanches réaffirmant ainsi les courbes et la sexualité féminine.

     

    Le style consistait à des jupes amples en crinoline portées avec des jupons en tuile.

     

    Les vêtements quand à eux étaient souvent à bases de matière légère à tels point qu’ils flottaient, ceux-ci étaient portés avec des bustiers.

     

    La veste centrée près du corps était conçu pour aller avec la jupe longue mais elle était également portée avec une jupe droite arrivant au demi mollet.

     
     
     

     1940s Fashion Piscine Molitor

     

    Accessoires

     

    En opposition avec le principe des vêtements fonctionnels, les années quarante ont vu l’apparition du bikini moderne. Celui-ci est inventé à Paris, par le couturier Jacques Heim et l’ingénieur Louis Réard.

     

    Ce nouveau maillot de bain était composé de deux pièces.

     

    En mai 1946 il fut élu «le plus petit maillot de bain” au monde.

     

    Réard le nomma le «bikini», à partir à l’île du même nom connue pour avoir été un lieu d’expérimentations atomique.

     

    En effet, l’ingénieur pensait que ce nom reflétait bien le style provocateur et révélateur de ce maillot et que celui-ci avait le pouvoir de provoquer des chocs semblables à ceux d’une bombe atomique.

     

    Réard a modifié le style du maillot en diminuant le bas, il créa ainsi le premier bikini string. Néanmoins, il eut des difficultés à trouver un modèle et a été contraint d’engager une danseuse nue pour porter ses créations.

     

    Les chaussures de style «Mannish » sont apparues pour des raisons pratiques et sont devenues de plus en plus populaires chez les femmes. Les turbans étaient des accessoires utiles pour les femmes, celles-ci les utilisait comme un dispositif de sécurité pour travailler dans les usines mais aussi comme un moyen de cacher des cheveux en désordre.

     

    Le savoir-faire

     

    Avec l’arrivée du rationnement, le gouvernement a encouragé une politique du «savoir-faire». Celle-ci consistait essentiellement à réutiliser les vêtements qui étaient déjà la votre garde-robe et les mettre aux gouts du jour.

     

    Les femmes qui savaient coudre avaient la capacité de créer de nouveaux habits à partir de rien. En effet, celles-ci utilisaient des couvertures, des manteaux et des taies d’oreiller qu’elles coupaient et retravaillaient afin de créer un nouveau vêtement.

     

    Due au fait que les bas collants se faisaient rares, les femmes dessinaient alors l’arrière de leurs jambes avec l’aide d’un eyeliner pour recréer l’effet des collants. Le tricot était également très encouragée chez les femmes, à tel point que le gouvernement distribuait gratuitement des patrons afin que celles-ci puissent tricoter pour les troupes, soutenant ainsi l’idée que chacun pouvait apporter sa part.

     

    Vêtements pour Homme

     

    Inspiré directement des « Big Bands », les costumes « Zazou » ou « Fantaisies » étaient très en Vogue durant les années 40.

     

    Ceux-ci étaient composés d’un pantalon large taille haute et d’une longue veste.

     

    Le Tricot était également populaire notamment auprès des hommes, dont les pulls étaient assez voyant grâce à leurs imprimés vifs.

     

    zoot Fashion 1940s

     

    zoot Fashion 1943

     

      

     

     

    Les Icones

     

    Les stars du début des années quarante avaient un look simple et net. Bette Davis était une icône qui connue pour son interprétation de personnages antipathiques.

     

    Elle était l’une des actrices les plus célèbres de l ‘époque, réputée pour sa personnalité énergétique.

     

    Rita Hayworth également connu la gloire au cours des années quarante avec des films comme “Cover Girl” et “Ce soir et tous les soirs”.

     

    S’établissant ainsi au statut de sex-symbol et de pin up girl.

     

      

      

    Les Créateurs

     

      

     

      

     

    Claire McCardell

     

    Claire McCardell est une créatrice de mode proéminente du 20ème siècle. Elle est créditée pour avoir participé à l’orchestration du «Look américain». En véritable pionnière, elle a su créer un cadre confortable, en développant l’aspect pratique du style sportswear. Elle a déclaré: «Je viens d’un pays où règne la production de masse, où chacun a le droit d’être à la mode ». Inspiré par les vêtements masculins et usés, elle avait l’habitude d’utiliser de tissus basiques et était une grande partisane de la démocratisation de la mode.

     

    Charles James

     

    Charles James est considéré comme le premier couturier américain. Connu pour l’esthétique distinguée de ses vêtements, ses créations étaient de vraies œuvres d’art. De 1942 à 1945, il a collaboré avec Elizabeth Arden en exposant ses créations de haute couture dans son salon. Sa collection la plus marquante a été montrée en 1947 à Paris. Christobal Balenciaga le décrit comme : ” Le meilleur couturier au monde et le seul a avoir établit la couture en une forme d’art à part entière ».

     

    Guccio Gucci

     

    Lors de son séjour à Londres, Guccio Gucci a travaillé dans l’Hôtel Savoy en tant que maître d’hôtel. Impressionné par les bagages luxueux et sophistiqués des clients, ce dernier développa très vite un intérêt pour la maroquinnerie. A son retour à Florence en 1920 , il ouvrit un magasin et y vendit de la maroquinerie de style classique.

     

    Il gagna sa réputation de qualité, grace à l’expertise des ouvriers qu’il avait embauché. En 1938, élargie sa compagne et s’installe à Rome, ouvrant ainsi son premier magasin de vente au détail.

     

    Au cours des années quarante, il a créé le symbole emblématique de Gucci base sur

    l’emboîtement de la lettre G qui est toujours le logo emblématique de la marque.

     

     

     

     

     

    1940s Christian Dior

     
      
    sources D.R.
     
      

    2 commentaires
  • ecole abandonnee en 1940

     

     

    Les PILLAGES des FRANCAIS dans les MAISONS des REFUGIES...partis pour l'EXODE !!

     

    TIENS DONC !! là il ne s'agit pas de RACAILLES de QUARTIER, mais de VOS GRANDS PARENTS pour certains !!

    ALORS HEUREUX ?

     

     

    Afficher l'image d'origine

     

     

     

    vous avez récupérer des trucs sympa sur le BUFFET de PEPE ? dans la commode de MAMIE ?
    " petits souvenirs de l'occupation"

     

    ... mais CHUT les MURS ont des OREILLES !! n'est pas B.O.F. qui veut !

     

    pillage pendant l'exode en 1940

     

     

    au fait, certains PILLARDS ont même VOLE des JUIFS dans leurs appartements délaissés...

     

    et pour cause, les FRIDOLINS les ont EMBARQUES dans leurs CAMPS dans le pays de GOETH ! ou ailleurs ! donc place nette après tout passage des ordures ménagères ! vous pouvez critiquer les immigrés !! la HONTE !

     

    Les partants laissent leurs maisons offertes au pillage et les pilleurs sont légion : les militaires en déroute, les réfugiés de passage, les habitants restés dans les villes, Amiens, Roye, Abbeville, qui volent pour que les Allemands ne trouvent plus rien.

     

     

    pillage en 1940

     

    On a vu des paysans atteler les charrettes, non pour fuir, mais pour piller les villes : revanche sauvage des campagnes, saturnales du désordre.

     

    Pas de police ni de gendarmerie pour les arrêter. trop occupés par les réfractaires au S.T.O. puis après les JUIFS !

     

    Les magasins d’alimentation sont d’abord leur cible, les stocks livrés aux gens de passage affamés, aux résidents qui n’ont plus de commerçants et qui doivent cependant se nourrir.

    En l’absence d’ordre, la sauvagerie se déchaîne dans les villes de la Somme et de l’Aisne abandonnées par les autorités.

     

    A Abbeville, l’antiquaire, devenu tout ensemble maire et sous-préfet de sa propre autorité et de par la confiance des sauveteurs, engage des civils pour dégager les rues, enterrer les morts dans des fosses communes, s’occuper des blessés réunis en plein air dans un jardin, nourrir les vieillards de l’hospice. Il ose même réquisitionner des ouvriers payés en vivres pour attaquer les pillards à coups de bâton.

     

    Dans certains villages de la Somme, on a repéré des dépouilleurs de cadavres.

     

    Les châteaux ne sont pas seulement mis a sac, ils sont vandalisés.!!!

     

     

    Puisque l’autorité est absente, l’heure de la revanche a sonné, mais aussi celle du «chacun pour soi ».

     

    Une région entière est livrée à l’encan, offerte en proie, abandonnée à des hommes qui ne peuvent plus compter que sur eux-mêmes pour survivre.

     

    Parmi ceux-là, nombreux sont aussi ceux qui donnent des exemples de générosité, de dévouement aux blessés, aux enfants perdus, aux femmes en difficulté. Le meilleur et le pire.

     

    Les caves sont pillées, comme les magasins. Les objets précieux, vaisselle, argenterie, œuvres d’art des châteaux de la région, linge, stocks de tabac, bicyclettes, outils divers changent de main dans la ville ouverte.

     

    Dans Amiens occupé par les troupes d’assaut allemandes, le commandant doit faire afficher le 21 mai que toute personne surprise en train de piller sera fusillée.

     

    Les pillards sont rarement organisés.

     

     

     

    Beaucoup rendront leurs prises, quand les plaintes seront déposées. Mais d’autres pillent pour récupérer les richesses indûment gagnées.

     

    Outre le pillage alimentaire, opéré par les gens de passage, l’accaparement des objets précieux est soit le fait des militaires, soit des civils habitant les villes ou leurs envIrons.

     

    Un capitaine, de Nadaillac, constate la mise à sac d’une propriété proche de Compiègne.

     

    Puisque les Allemands vont venir, servons-nous d’abord, disent les pillards. !

     

    ben voyons LEON !!

     

    Pillage de la Synagogue de Bayonne en 1942:

     

    Afficher l'image d'origine

     

     

    Les riches paysans, les bourgeois des villes ont abandonné leurs biens pour sauver leur peau.

     

    Ceux qui restent sous les bombes et les rafales s’estiment en droit de voler à l’ennemi, qui n’hésite pas à piller les caves, le butin qu’il convoIte. LES BOUTEILLES !! les CONSERVES.. vas-y GASTON !

     

    L’officier parle d’un effondrement psychologique de pays qui était terrible à constater. Il faudrait plutôt évoquer la disparition singulière des forces de l’ordre, la défaillance des agents de l’Etat qui permet tous les excès.!! surtout pour ces cas précis !

     

     

     

     

     


    1 commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique